Assurance supply chain : les enjeux de la traçabilité

L’un des enjeux majeurs de l’assurance de la supply chain réside dans le suivi de l’exposition aux risques de chaînes d’approvisionnement très mouvantes. Passage en revue des innovations et de leurs utilisations potentielles.

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Assurance supply chain : les enjeux de la  traçabilité

Le 12 août 2015, deux explo­sions sur le port de Tianjin, quatrième port de Chine, ont fait 165 morts, 800 blessés et 8 disparus. Une catastrophe techno­logique qui a touché, selon la commission d’enquête chinoise, 12 428 voitures et 7 533 conteneurs sachant que, selon l’IUMI (fédération internationale de l’assurance maritime), 70 000 véhicules étaient présents sur le port au moment des explosions. Ce sinis­tre, qui a mis en lumière l’ampleur du cumul des stocks en un seul lieu, a créé une certaine tension sur ce risque avec un assèchement progressif des capacités d’assurance et de réassurance, notamment pour les parcs automobiles. « Nous observons une certaine tension sur le risque de stockage avec des assureurs qui incitent leurs clients à répartir leurs stocks sur plusieurs lieux pour limiter le risque de cumul. Par exemple, au niveau logistique, les problématiques d’évacuation des cargaisons pour minimiser les stocks sur les hubs portuaires sont prégnantes », obser­ve Frédéric Jousse, directeur logistique chez Bessé. La Comat, la Commission des assurances transports de la FFSA, a donc mis en place un groupe de travail sur ce risque jugé prioritaire. « Les garanties stockage prennent de plus en plus de place dans l’exposition alors qu’elles sont accessoires dans la couverture du risque transports », souligne Fabien Guibert, respon­sable de la souscription cargo pour AxaCS lors des « Rendez-vous de l’assurance transports 2016 ». Une restitution des travaux est prévue fin juin. Et en parallèle, le marché se structure pour améliorer la traçabilité des marchandises transportées.

Géolocalisation ou calculs actuariels

« Notre capacité de modélisation de ces risques s’est jusque-là limitée à des modèles statistiques intégrant la saisonnalité des flux économiques (NDLR : le lancement d’un smartphone ou l’accroissement de la demande à Noël), mais le développement des techno­logies de l’information permettra à l’avenir un suivi plus précis de ces risques », expose Matthieu Caillat, responsable du développement de la souscription chez AxaCS. Objectif : multiplier les critères d’accumulation et les facteurs de risques en local, pour optimiser les calculs actuariels. Côté entreprises, la technologie permet désormais de mettre en place des suivis de conteneurs par radio-identification (RFID). Une initiative qui ne provoque pas l’enthousiasme du marché de l’assurance. « Le suivi des conteneurs par puces RFID permet de savoir où se trouve un colis à un instant T, en cas de dispa­rition ou de vol, par exemple, mais je ne pense pas que cela puisse nous aider à suivre les accumulations car il est très difficile pour un chargeur de connaître la localisation de toutes les marchandises en transit », nuance Marie-Laure Tournebize, directrice du département maritime et transport chez Gras Savoye. On pourra identifier le propriétaire, et donc l’assureur, d’un conteneur tombé à l’eau (350 par an en moyenne) mais il est peu probable de parvenir à suivre les flux. « Structurellement, l’information sur les marchandises transportées est éparpillée entre plusieurs interlocuteurs », rappelle Marie-Laure Tournebize qui croit davantage aux perspectives offertes par la gestion des données pour maîtriser les cumuls de valeur. Quant à l’apport de la digitalisation pour cartographier des chaînes d’appro­visionnement complexes, c’est une préoccupation majeure des entreprises ces dernières années. Dernière en date, le groupe Louis Vuitton, qui organise un hackathon mi-juin pour structurer sa chaîne d’approvisionnement autour d’une plateforme de planification collaborative. De manière générale, 70 % des dirigeants, interrogés par GT Nexus et Capgemini Consulting lors du bilan 2015 de la supply chain, ont indiqué avoir entamé une transformation digitale. Un processus embryonnaire puisqu’ils ne sont encore que 5 % à se déclarer très satisfaits des résultats obtenus. Et, s’ils ne sont que 23 % à assurer que les données remontées de leurs fournisseurs sont analysés dans le cadre de processus décision­nels, ils s’avèrent 68 % à penser qu’ils seront au point dans 5 ans.

Ces supply chain digitales visent à faire remonter des informations sur les fournisseurs directs : l’état du stock, les incidents de production, etc. Elles obligent donc l’entreprise à mettre à plat son organisation et à identifier les fournisseurs stratégiques (voir encadré). Cette évolution, qui apporte une meilleure visibilité sur une organisation complexe, est toutefois observée avec prudence par le marché qui craint de voir les entreprises optimiser encore un peu plus leur gestion en flux tendu. « À mon sens, cela risque d’accentuer la vulnérabilité de la supply chain », prévient ainsi Denis Bicheron, directeur des lignes techniques chez Gras Savoye. La digitalisation accentue le vertige des assureurs.

François-Régis Le Tourneau, responsable standards et prospectives auprès de la direction supply chain de l'Oréal

« Notre plateforme connecte nos 44 usines avec leurs principaux fournisseurs »

Le groupe L’Oréal a lancé la digitalisation de sa supply chain intégrée en 2013. « Chaque semaine, les informations sur les stocks dans les usines remontent, et nous avons également une vision des stocks chez nos fournisseurs, y compris pour ceux en transit même si ces données sont encore peu homogènes. Notre plateforme connecte nos 44 usines avec leurs principaux fournisseurs (NDLR : ils représentent environ 70 % des achats entrant dans les produits finis). Nous les choisissons pour leur importance stratégique dans notre catalogue plutôt que par rapport à la part de leur contribution à notre chiffre d’affaires. Cette liste comprend également des fournisseurs nous permettant d’avoir accès à des savoir-faire exclusifs (NDLR : des fournisseurs uniques). Grâce à cette plateforme e-supply, nous pouvons piloter de manière très réactive nos productions et nos stocks en cas de forte accélération de la demande de la clientèle ou intervenir en gestion de crise en cas de dommage chez un de nos fournisseurs ou d’avarie de transport. Ces deux dernières années, nous n’avons pas eu d’impact sur notre chiffre d’affaires après une carence de fournisseurs. »

 

Structurellement, l’information sur les marchandises transportées est éparpillée entre plusieurs interlocuteurs.

Marie-Laure Tournebize, directrice technique Maritime et Transport chez Gras Savoye

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