Nicolas Théry (Crédit Mutuel CIC) : « Notre responsabilité est de répondre à l’inquiétude de nos clients professionnels »
Nicolas Théry est président du groupe Crédit Mutuel et président du CIC. Dans une interview à l'Argus, il revient sur la décision du groupe bancaire de verser, via ses filiales d'assurance, une prime forfaitaire à ses assurés professionnels victimes de la crise du Covid-19.
Aurélie Abadie

Les Assurances du Crédit Mutuel et CIC Assurances vont distribuer une « prime de relance » forfaitaire à leurs clients ayant souscrit une assurance multirisques professionnelle les couvrant contre les pertes d’exploitation, alors même que ces garanties ne s’appliquent pas à la situation créée par le Covid-19. Quel est le sens de ce geste ?
Nicolas Théry : C’est bien de cela dont il s’agit : un engagement majeur auprès de nos assurés qui nous ont fait confiance. Les assurés paient chaque année une prime afin d’obtenir une garantie. Or, dans le cas de la crise économique générée par le Covid-19 et les mesures de confinement, ces garanties contractuelles ne s’appliquent pas. Avec Pierre Reichert, le président du directoire des Assurances du Crédit Mutuel, nous avons donc décidé de venir en aide à nos clients professionnels en difficulté au moyen d’une prime de relance mutualiste. Cette initiative vise à répondre à un besoin collectif évident que nous avons entendu et compris : il s’agit de faire la preuve du mutualisme vis-à-vis de nos clients, dans nos actes, en les accompagnant pour traverser cette crise.
>>> Lire : Le Crédit Mutuel CIC fait un geste exceptionnel
N’est-ce pas également un moyen de les fidéliser ?
N.T : Certes, mais la priorité actuelle et l’enjeu de cette décision n’ont rien à voir avec cela. Le dispositif de primes de relance mutualistes va bénéficier à quelque 30 000 clients assurés aux Assurances du Crédit Mutuel et au CIC Assurances au titre de l’assurance multirisque professionnelle perte d’exploitation. Cela représente un effort de près de 200 millions d’euros, ce qui représente pour nous 75 ans de primes ! Cela va impacter avant tout nos fonds propres et nos résultats. Face aux difficultés traversées par nos clients artisans, commerçants, restaurateurs, nous avons décidé de nous placer sur le plan des faits, et non de nous abriter derrière des arguties juridiques. Ces clients nous ont fait confiance en souscrivant les garanties les plus étendues possibles, leur inquiétude et leur attente sont fortes et il en va de notre responsabilité morale d’y répondre. L’enjeu n’est pas une querelle contractuelle ou juridique, ni une querelle entre les familles de l’assurance ! Il s’agit pour nous d’offrir une aide rapide à nos clients en difficulté dans les territoires où nous sommes présents.
Vous parlez de débloquer un soutien rapide envers vos clientèles de professionnels. Comment accueillez-vous le travail du gouvernement et de la profession sur la création d’un régime d’assurance spécifique destiné à couvrir les conséquences d’une telle catastrophe pour les entreprises ?
N.T : C’est une initiative qui mérite d’être creusée sur les risques de pointe, ce qui nécessite, selon moi, du temps afin de bâtir des solutions à la lumière de l’expérience. Présenter des propositions sur un tel dispositif dès juin me semble un peu précipité. Cette initiative, que je salue néanmoins, ne peut se substituer aux nécessaires réponses aux besoins immédiats de nos clients. Ce qui se joue aujourd’hui, c’est la solidité et la cohérence de notre tissu économique et social. Il s’agit d’être en alerte dans les territoires où de petites entreprises risquent de disparaître avant qu’un tel dispositif assurantiel ne voit le jour. Le facteur clef, c’est le délai. Le temps d’aujourd’hui est celui de l’urgence, le temps de la réflexion viendra après. Cette crise nous force à agir de manière simple et à se concentrer sur l’essentiel. Il n’est pas question d’agir de manière conjoncturelle sur des questions structurelles.
Les assureurs connaissent, pendant cette période de confinement, une baisse de la sinistralité marquée en automobile. L’idée qu’ils devraient redistribuer ces gains, à l’image de la Maif, a beaucoup circulé. Qu’en est-il pour les assurances du Crédit Mutuel et du CIC ?
N.T : En tant qu’assureurs diversifiés couvrant toutes les branches, les Assurances du Crédit Mutuel et CIC Assurances connaissent un double effet sur la sinistralité. Du fait du confinement et de la réduction de la fréquence des déplacements des assurés, elles bénéficient d’une baisse de la sinistralité en auto et en habitation. Mais elles subissent aussi une hausse de la sinistralité sur les garanties santé, prévoyance, décès et vie, d’autant que la région Grand Est, qui est le point d’ancrage historique du groupe Crédit Mutuel, enregistre malheureusement un nombre élevé de malades et de décès ainsi que de personnes en arrêts de travail. Ces deux effets sur la sinistralité se compenseront peu ou prou.
Propos recueillis par Aurélie Abadie
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