L'édito : Realpolitik

Voilà deux nouvelles piochées dans l’actualité récente de l’assurance. Deux nouvelles a priori très éloignées l’une de l’autre, tant par leur nature que par leurs protagonistes. Deux nouvelles qui témoignent pourtant à des degrés divers des évolutions qui travaillent en profondeur ce secteur en général, et le monde mutualiste en particulier, codes des assurances et de la Mutualité réunis.
La première information est l’annonce d’un partenariat. Au beau milieu des vacances d’hiver, La Mutuelle des étudiants (LMDE) a révélé son alliance avec Axa afin de proposer des couvertures dommages et des services bancaires à ses assurés. Un communiqué d’une dizaine de lignes qui n’a pas véritablement suscité de commentaires au-delà des médias spécialisés. Même pas un tweet-clash sur le réseau de l’oiseau qui gazouille.
La future Fédération française de l’assurance, qui regroupera les sociétés de la FFSA et les mutuelles d’assurance du Gema, adhérera bien au Medef.
Pourtant, sans remonter à la préhistoire mutualiste, difficile d’imaginer, il y a encore quelques années, ce type d’organisme passer un accord en dehors du cercle des mutuelles – son partenaire habitation et auto était d’ailleurs jusqu’à présent la Matmut. Non seulement La Mutuelle des étudiants tourne le dos à sa famille, mais en plus, le fief du syndicat étudiant Unef, en pleine mobilisation aujourd’hui contre la loi El Khomri, pactise avec celle qui symbolise plus que d’autre la grande compagnie d’assurance.
Mais il est vrai que LMDE est en pleine phase de redressement et qu’elle est désormais substituée par Interiale, une mutuelle qui n’a pas hésité dans le passé à s’affranchir des dogmes pour gagner en efficacité. Et d’ailleurs, pour justifier le choix d’Axa après appel d’offres, LMDE évoque un « partenaire robuste, reconnu et leader dans son domaine ». Tout est dit ! Pour assurer leur survie, les étudiants croient davantage en Aron qu’en Sartre.
Le second fait d’actualité est une confirmation. La future Fédération française de l’assurance qui regroupera, à compter du 1er juillet prochain, les sociétés de la FFSA et les mutuelles d’assurance du Gema, adhérera bien au Medef. Alors certes, les membres de la FFA auront individuellement le choix de rejoindre, ou pas, l’organisation patronale. Mais les mutuelles vont bien – même indirectement – intégrer les rangs du mouvement de Pierre Gattaz et devenir des patrons comme les autres. On peut même imaginer demain qu’un mutualiste siège dans la délégation patronale lors d’une négociation interprofessionnelle avec les syndicats. Et c’est bien pourquoi, l’annonce d’une adhésion concomitante de la FFA à l’Udes, la fédération des employeurs de l’économie sociale et solidaire, en laisse plus d’un sceptique.
L’enjeu de cette «maison commune», envisagée voilà près de 25 ans, n’est pas mince. En réunissant ses forces, l’assurance entend peser davantage dans ses relations – souvent houleuses – avec les autorités françaises et européennes.
Et concernant l’adhésion au Medef, «Paris vaut bien une messe», justifie dans nos colonnes Gérard Andreck, l’ancien président de la Macif et du Gema. La formule est osée dans cet univers mutualiste attaché à la laïcité, mais elle ne fait que renforcer la démonstration : qu’on le regrette ou non, le monde de l’assurance en a quasiment fini avec ses guerres de religion !
Base des organismes d'assurance
AbonnésRetrouvez les informations complètes, les risques couverts et les dirigeants de plus de 850 organismes d’assurance
Je consulte la base