Sécurité routière : le débat enfle sur la limitation de vitesse à 80 km/h
Après une enquête de « 40 millions d’automobilistes » dénonçant l’inefficacité de la mesure, le ministère de l’Intérieur lance une grande campagne de communication.

« Rouler moins vite, c’est sauver plus de vies ». Le gouvernement parviendra-t-il à convaincre les automobilistes du bien-fondé de l’abaissement de la vitesse à 80 km/h sur les routes secondaires ? La mesure annoncée par le Premier Ministre le 9 janvier dernier afin de faire reculer la mortalité routière ne fait pas l’unanimité.
Après le Sénat qui a réclamé, en vain, à Matignon, les résultats de l’expérimentation menée de juillet 2015 à juin 2017 sur trois tronçons routiers, « 40 millions d’automobilistes » a jeté un pavé dans la mare la semaine dernière en publiant ses propres chiffres. Selon l’association, qui s’est basée sur les chiffres du Bulletin d’analyse des accidents corporels de la circulation (BAAC), 32 victimes d’accidents de la route ont été déplorées en 2016, dont 2 décès. Cela représente 5 fois plus que la moyenne nationale du nombre de tués sur les routes, qui s’élevait cette année-là à 0,4.
Mesure efficace...
Suffisant pour conclure à une mesure contre-productive ? Le ministère de l’Intérieur qui, affirme-t-il ne détient pas de « rapport secret » sur cette expérimentation, met en avant les biais méthodologiques d’une telle étude dans les tronçons sélectionnés, le choix des accidents et des périodes. Selon l’ONISR (Observatoire national interministériel de la sécurité routière), le nombre de victimes tuées (3) et hospitalisées plus de 24 heures (18) a baissé sur la période de juillet 2015 à juin 2017. Le nombre de blessés légers (25) a, en revanche, augmenté.
Le gouvernement se défend, par ailleurs, en rappelant qu’une telle expérimentation « très limitée dans l’espace et le temps » ne saurait à elle seule justifier sa décision. Ainsi, il s’appuierait sur une étude du Conseil national de la sécurité routière de 2013 arguant qu’une baisse de 10km/h sur les routes de campagne permettrait de sauver 350 à 400 vies chaque année.
... ou TROMPE-L'OEIL ?
Alors que la guerre des chiffres fait rage, le ministère de l’Intérieur lance une grande opération de communication. Jusqu’au 20 mars 2018, trois graphiques publiés dans la presse vanteront les bienfaits de la limitation de vitesse : elle permet de faire reculer la mortalité routière, réduit les distances de freinage et n’allonge pas les temps de trajet pour les automobilistes. Et, en plus, elle permettrait d’économiser 120€ de carburant par an en moyenne !
Les experts restent partagés. « La vitesse est un facteur aggravant dans les accidents, mais on ne résoudra pas le problème de la mortalité par ce biais. La vraie question est d’avoir une vitesse adaptée par rapport à la situation et à l’environnement. On peut aujourd’hui respecter le code de la route et, pour autant, rouler à une vitesse excessive et dangereuse. Il serait plus judicieux d’adapter la vitesse sur des zones et des tronçons particuliers en régulant entre 90 et 70 km/h », estime un acteur de la prévention routière, interrogé par l'Argus de l'Assurance. Le gouvernement a promis un « bilan objectif et précis » de la mesure au 1er juillet 2020.
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