Mieux détecter le risque avant sinistre
Face à des assurés toujours plus pressés et connectés, la solution « Underwriting Risk Detection » de Shift permet à la fois d’améliorer l’analyse du risque à la souscription et de détecter la déclaration incomplète ou la fraude documentaire, bien en amont d’un éventuel sinistre. Explications avec Sofiane Gomri, Expert Métier Souscription chez Shift Technology.

Les assureurs sous-estiment-ils la fraude à la souscription ?
Oui, sans aucun doute. La fraude aux sinistres est plus compréhensible et plus directe pour les assureurs. En cas de sinistre frauduleux détecté, les gains sont clairs et immédiats : ils ne payent pas le sinistre. Lors de la phase de souscription, il existe un double enjeu, à la fois de mauvaise évaluation du risque (et donc une perte de prime) et de fraude documentaire/fausse déclaration, préparant potentiellement une fraude au sinistre. Ce que nous proposons, c’est justement de ne pas attendre l’arrivée d’un sinistre pour s’apercevoir de ce double risque, en l’analysant dès la souscription. Mais cela peut conduire parfois à augmenter la prime, voire à refuser une souscription… une décision difficile commercialement sur un marché très concurrentiel.
Est-ce un problème humain ou technique ?
Les deux ! Les capacités d’intervention des équipes souscription sont limitées. En moyenne en France, un assureur peut auditer au mieux seulement 10 % des souscriptions et des demandes de devis, prises au hasard. Cette vérification aléatoire est un processus manuel long et peu rentable, surtout compte tenu des volumes importants en jeu. Il est, concrètement, impossible de tout revérifier. Face à cette masse de données difficiles à exploiter car souvent non structurées, dans des formats multiples (scans, photocopies…), les outils ont longtemps été insuffisamment développés. Heureusement, depuis quelques années, les nouvelles technologies ont changé la donne, grâce à une meilleure accessibilité aux données (Big Data, open source…) et à des outils plus puissants dotés d’IA capable d’analyser ces données non structurées. Les algorithmes de notre solution sont ainsi capables non seulement de les déchiffrer mais de les enrichir en s’appuyant sur des données externes, d’effectuer des calculs rapides et surtout d’apprendre de leurs résultats.
En quoi la solution « Underwriting Risk Detection » de Shift peut-elle les aider ?
Notre solution aide les assureurs à relever plusieurs défis importants auxquels ils font face : d'abord pouvoir traiter un grand volume des données (que ce soit des polices déjà en portefeuille ou des demandes de devis), ensuite fournir une réponse dans des délais de traitement de plus en plus court, et enfin avoir toutes les informations pertinentes pour la prise de décision. Cet outil vient en effet enrichir les données fournies par l’assuré dans son formulaire d’estimation du risque, en les croisant d’une part avec des données internes historiques sur le client, s’il est déjà en portefeuille sur d’autres lignes de métier, mais aussi en parallèle avec des bases externes, dans les limites réglementaires du RGPD. Il ne s’agit donc pas seulement d’une aide à la détection de fraude à la souscription (carte grise falsifiée, fausse pièce d’identité, fausse déclaration…) mais aussi d’un moyen de mieux analyser le risque, de développer son portefeuille en toute confiance et de fixer la prime au bon niveau. En agissant à la fois sur les sinistres et sur les primes, le ratio S/P et les résultats techniques s’améliorent. Enfin, les informations complémentaires fournies par la solution évitent à l’assureur de poser des questions auxquelles il a déjà la réponse par ailleurs, accélérant ainsi le processus de souscription. Les risques de perte du prospect diminuent et l’expérience client s’en trouve améliorée. L'effet vertueux est donc double : meilleure rentabilité et meilleure satisfaction client, ce qui est assez rare pour être noté.
Comment fonctionne-t-elle ?
Cette solution existe depuis 2020 et est déployée chez de nombreux clients. Nous continuons à l’améliorer grâce à leurs retours d’expérience. Elle s’appuie sur toute l’expertise que Shift a pu accumuler sur la fraude aux sinistres, car le moteur de l’IA est commun aux deux solutions. On y a ajouté une expertise métier. Concrètement, le fonctionnement de l’outil « Underwriting Risk Detection » se déroule en 5 étapes : d’abord, nous récupérons et mappons toutes les données qui sont chez l’assureur (devis, IP de connexion, autres contrats en portefeuille…). Ensuite, nous les nettoyons et les restituons à l’assureur, afin de reconstituer l’identité du prospect ou client. Puis, nous enrichissons ces informations avec des données externes pour construire son réseau et ses liens avec différentes personnes ou contrats. Dans l’étape 4, ce sont les algorithmes qui entrent en jeu, à partir des différents scénarios travaillés au préalable avec l’assureur. En effet, la solution est déployée au cas par cas en fonction du process de l’assureur, de ses priorités, de ses enjeux et de ses difficultés. Enfin, la dernière étape est la phase de restitution des alertes qui peut se faire soit sous forme d’interface personnalisée mise à la disposition de l’assureur (le plus fréquent) ou bien via des API envoyées en temps réel vers l’outil de l’assureur.
Sur quels types de contrats s’applique cette solution ?
Pour le moment, nous déployons cet outil uniquement pour l’assurance dommages, car c’est là qu’il y a le plus de volume et de maturité sur le marché français. Mais le raisonnement et les algorithmes mis en œuvre dans la solution restent valables et pourront être déployés sur les autres lignes de métiers. En prévoyance par exemple, d’énormes problèmes se posent lorsque l’assureur découvre après des années qu’il y a eu une mauvaise déclaration du risque à l’origine. Il se voit alors contraint de refuser l’indemnisation, ce qui peut nuire à son image de marque. Et du côté de l’assurance-vie subsistent encore de nombreuses problématiques de protection de données du côté des assureurs, qu’il faut encore mettre au clair.
Chiffres clés :
2,5 Md€ = estimation des pertes annuelles liées à une sous-estimation du risque en France.
14 % = estimation des assurés prêts à effectuer une déclaration mensongère auprès de leur assureur.