ACCIDENT LIÉ À LA VOIRIE : QUI EST RESPONSABLE ?La Compagnie générale des eaux tombe pour défaut d'entretien normal de l'ouvrage public. Mais la victime a fait preuve d'imprudence.
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ACCIDENT LIÉ À LA VOIRIE : QUI EST RESPONSABLE ?
La Compagnie générale des eaux tombe pour défaut d'entretien normal de l'ouvrage public. Mais la victime a fait preuve d'imprudence.
Le 10 juin 1992, Alexandre P. et deux camarades circulent en cyclomoteur sur le CD n° 1, dans la commune de Verneuil (Marne). Soudain, le jeune conducteur fait un écart sur la gauche, freine, et perd le contrôle de son deux-roues. Il termine son parcours encastré sous un véhicule venant en sens inverse. Il s'en sort avec une fracture ouverte du fémur droit. C'est la présence d'une tranchée sur la chaussée qui est la cause de cet écart, clame le cyclomotoriste. Afin d'obtenir réparation, lui et son assureur, AGF, poursuivent la Compagnie générale des eaux (CGE) devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne.
Travaux non signalés...
Le 15 octobre 1996, ce dernier leur donne partiellement raison et alloue à la victime 1 220 € pour réparer les conséquences dommageables de l'accident. Une somme qu'Alexandre P. estime bien insuffisante. Il interjette appel devant la cour administrative d'appel (CAA) de Nancy et réclame 28 200 €, déduction faite de la créance de la Caisse d'assurance maladie. " Il résulte de l'instruction, relève la cour d'appel, que la manoeuvre effectuée par monsieur P. a été provoquée par la volonté d'éviter un affaissement sur la partie droite de la chaussée, résultant de la dégradation, consécutive à un orage, du tout-venant utilisé pour reboucher provisoirement la tranchée d'un mètre de largeur exécutée la veille par la Compagnie générale des eaux. Ces travaux inachevés ne faisaient l'objet d'aucune signalisation. " Or, de jurisprudence constante, dans les cas d'accident dont sont victimes les usagers des ouvrages publics, le défaut d'entretien normal de l'ouvrage est présumé. Le maître d'ouvrage ou l'entrepreneur est donc présumé fautif. Et en l'espèce, juge la cour d'appel, la CGE " n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'entretien normal de la voie publique ". Sa responsabilité est engagée.
... mais conduite inadaptée
Toutefois, analyse la CAA, la tranchée était placée dans un virage donnant lieu à une signalisation de danger, il pleuvait lors de l'accident et les camarades d'Alexandre P. ont pu conserver la maîtrise de leur cyclomoteur. Elle en déduit que " l'accident doit être regardé comme également imputable à l'imprudence de l'intéressé, qui n'a pas adapté la vitesse de son véhicule à la configuration des lieux et aux circonstances atmosphériques ". C'est donc par une juste appréciation des circonstances que le tribunal administratif a estimé que la responsabilité de la CGE ne devait être engagée... qu'à concurrence de 50 %, juge la cour. Une donnée qui influe sur la réparation financière accordée à la victime, mais aussi sur les droits de la Caisse d'assurance maladie, qui cherche à récupérer son dû. La cour se penche d'abord sur le préjudice global résultant de l'accident et en refuse le rehaussement demandé. La frac- ture du fémur a entraîné une incapacité temporaire de travail de trois mois, puis une nouvelle de quinze jours. Mais la victime n'a pas dû interrompre son activité scolaire, et si les très légères séquelles qui subsistent peuvent l'empêcher de pratiquer certains sports, elles demeurent compatibles avec la plupart d'entre eux. Elles ont été évaluées par expert à une incapacité permanente partielle de 2 %. Les souffrances physiques éprouvées du fait de l'accident et de la rééducation sont modérées et le préjudice esthétique est minime. La cour estime dès lors que 1 524 € compensent les troubles de toute nature touchant les conditions d'existence de la victime (dont 610 € pour les troubles physiologiques) et 1 524 € ses souffrances physiques et esthétiques. Les frais médicaux, pharmaceutiques et d'hospitalisation s'élevant à 5 344 €, le préjudice global atteint 8 392 €, dont la moitié est à la charge de la CGE. La caisse maladie régionale des professions indépendantes de Champagne-Ardenne n'accepte pas cette décision. Elle plaide avoir droit au remboursement de l'intégralité des prestations versées. En vain. L'article L. 376-1 du code de la Sécurité sociale, cite la CAA, énonce : " Si la responsabilité d'un tiers est entière ou si elle est partagée avec la victime, la caisse est admise à poursuivre le remboursement de ses prestations à due concurrence de la part d'indemnité mise à la charge du tiers qui répare l'atteinte à l'intégrité physique de la victime, à l'exclusion de la part correspondant aux souffrances physiques ou morales et au préjudice d'esthétique et d'agrément. " Dès lors, applique la cour, " la part d'indemnité sur laquelle peuvent s'imputer les droits des caisses d'assurance maladie doit être calculée après application de l'éventuel partage de responsabilité décidé par le juge entre le tiers auteur du dommage et la victime ". Elle se limite en l'espèce à 2 977 €. La cour déduit alors cette somme du montant en réparation à la charge de la CGE (4 196 €) et en conclut que l'indemnité due à Alexandre P. est bien de 1 219 €.
Enfin, la cour clôture sans s'attarder le volet des intérêts, parce qu'ils sont de droit : " Tout jugement prononçant une condamnation à une indemnité fait courir les intérêts au taux légal du jour de son prononcé jusqu'à son exécution. "
(CAA Nancy, 31 janvier 2002 ; n° 97NC00027.)
UNE FAUTE SANS LIEN DE CAUSALITÉ
Une personne est grièvement blessée lors d'une épreuve de natation dans la base nautique départementale d'Ecollemont (Marne). Le département est condamné en première instance à indemniser l'assureur de la victime, la Maif. La cour administrative d'appel (CAA) admet que l'absence de matériel de réanimation sur le site était fautive. Mais une expertise démontre que, compte tenu des moyens mis en oeuvre par les maîtres nageurs, la présence de ce matériel n'aurait pas modifié l'état de la victime, ni le taux d'invalidité dont elle reste atteinte. La CAA estime donc qu'une faute de service ne pouvait pas fonder la condamnation du département. En l'absence de lien de causalité entre le défaut de matériel et les séquelles, et dès lors que l'organisation de l'épreuve ne peut pas être regardée comme fautive ou constitutive d'un défaut d'entretien de l'ouvrage public, c'est à tort que le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a accordé 397 393 e à la Maif. (CAA Nancy, 28 février 2002, n° 96NC01319.)
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