L'AFFILIATION OBLIGATOIRE N'EST PAS FORCÉMENT ANTICONCURRENTIELLERégime d'assurance contre les risques d'accidents du travail ayant une finalité sociale, principe de solidarité, cotisations et prestations sous contrôle de l'État : l'Inail n'est pas une entreprise.
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L'AFFILIATION OBLIGATOIRE N'EST PAS FORCÉMENT ANTICONCURRENTIELLE
Régime d'assurance contre les risques d'accidents du travail ayant une finalité sociale, principe de solidarité, cotisations et prestations sous contrôle de l'État : l'Inail n'est pas une entreprise.
Àl'origine de l'arrêt du 22 janvier 2002 de la Cour de justice des communautés européennes (CJCE), une affaire opposant, devant la justice italienne, un artisan et l'Institut national italien d'assurance contre les accidents du travail (Inail). Méconnaissant un décret du 30 juin 1965 qui réglemente l'assurance obligatoire contre les accidents du travail et les maladies professionnelles, l'entreprise artisanale Cisal n'affilie pas son gérant à l'Inail. Fin 1998, le Pretore di Vicenza enjoint Cisal de payer à l'Inail 6 606 890 lires de cotisations non versées au titre des années 1992 à 1996 : " Le gérant associé aurait dû être affilié à l'Inail (...) en tant qu'artisan travaillant le bois et ayant une activité manuelle dans sa propre entreprise. " Le décret impose en effet aux employeurs d'assurer leurs employés auprès de l'Inail, aux sociétés de faire de même pour leurs associés, et aux artisans indépendants de s'y assurer eux-mêmes. Cisal s'oppose à l'injonction de payer. Depuis 1986, son gérant est assuré contre les accidents du travail auprès d'un assureur privé. Pour lui, l'obligation de s'assurer contre ces risques auprès de l'institut public est contraire au droit communautaire de la concurrence. Selon Cisal, l'autorité nationale de la concurrence et du marché a émis en février 1999 l'avis que : " L'Inail ne présente pas d'éléments de solidarité propres à exclure, sur le fondement de la jurisprudence communautaire, la nature économique de l'activité exercée. " Sensible à ces arguments, le Tribunale de Vicenza demande à la CJCE de l'éclairer : " Y a-t-il lieu de qualifier d'entreprise, au sens des articles 85 et 86 du traité de Rome, un organisme public sans but lucratif auquel est confiée la gestion monopolistique d'un régime d'assurance contre les risques d'accidents et de maladies professionnels ? Si oui, est-il contraire au droit communautaire que cet organisme prétende au paiement de primes quand l'intéressé est déjà assuré auprès d'une compagnie privée pour les mêmes risques ? " La CJCE n'aura pas à répondre à la seconde question car, pour elle, l'Inail n'est pas une entreprise.
Le système protège tous les travailleurs
La cour relève que le régime légal d'assurances en question, en ce qu'il prévoit une protection sociale obligatoire pour les travailleurs non salariés exerçant une activité répertoriée à risque par le décret, poursuit un objectif social. Il vise en effet à assurer à l'ensemble des personnes protégées une couverture des risques, indépendamment de toute faute de la victime ou de l'employeur, donc " sans qu'il soit nécessaire d'engager la responsabilité civile de la personne tirant les bénéfices de l'activité comportant un risque ". Pour elle, ce régime a une finalité sociale : les prestations sont versées, alors même que les cotisations n'ont pas été acquittées, ce qui contribue à la protection de tous ; et, même après la réforme de 1997 qui exclut cette automaticité de couverture pour les indépendants n'ayant pas versé à temps leur cotisation, les prestations peuvent être servies en cas de régularisation ultérieure. Toutefois, ajoute la CJCE, la finalité sociale du régime " ne suffit pas en soi à exclure que l'activité en cause soit qualifiée d'économique ". Mais pour la Cour, deux autres aspects lèvent le doute.
Indispensable à l'équilibre financier de l'Inail
D'abord, le régime met en oeuvre le principe de solidarité entre les travailleurs les mieux rémunérés et ceux à faible revenu. Le régime est financé par des cotisations dont le taux n'est pas proportionnel au risque assuré. Ce taux ne peut dépasser un plafond, même pour les activités à haut risque, le solde étant supporté par toutes les entreprises de la même classe pour le risque encouru. De plus, les cotisations sont calculées sur la base du risque lié à l'activité et en fonction des revenus de l'assuré. Quant aux prestations versées, elles ne sont pas proportionnelles au revenu de l'assuré, observe la CJCE : pour le calcul des rentes, seuls les salaires correspondant à la rémunération moyenne, minorée ou majorée de 30 %, peuvent être pris en considération. Ensuite, convainc la CJCE, l'activité de l'Inail, auquel la gestion du régime a été confiée par la loi, est soumise au contrôle de l'État qui fixe en dernier ressort le montant des cotisations et des prestations. Ces dernières devant être versées indépendamment des cotisations perçues et des résultats financiers réalisés par l'Institut. " L'affiliation obligatoire qui caractérise un tel régime d'assurances est indispensable à son équilibre financier, ainsi qu'à la mise en oeuvre du principe de solidarité ", affirme la Cour. Elle en conclut : " En concourant à la gestion d'une des branches traditionnelles de la sécurité sociale, l'Inail remplit une fonction sociale. Son activité n'est pas une activité économique au sens du droit de la concurrence. Dès lors, cet organisme ne constitue pas une entreprise au sens des articles 85 et 86 du traité. " Sylvie Gobert
(CJCE, 22 janvier 2002, affaire C-218/00.)
UNE BRANCHE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
" Dans le contexte du droit de la concurrence, rappelle la CJCE, la notion d'entreprise comprend toute entité exerçant une activité économique, indépendamment de son statut juridique et de son mode de financement (...) Constitue une activité économique toute activité consistant à offrir des biens ou services sur un marché. " Par ailleurs, pose la Cour, le droit communautaire ne porte pas atteinte à la compétence des États membres d'aménager leur système de sécurité sociale. Or, la couverture des risques d'accidents du travail et de maladie professionnelle relève de longue date de la protection sociale que les États garantissent à tout ou partie de leur population. En outre, le règlement de 1971 (mis à jour en 1996), relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs et à leur famille qui se déplacent dans l'Union, comporte des dispositions de coordination pour l'application desquelles l'Inail est désigné comme institution compétente pour l'Italie.
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